Certains secteurs, comme ceux de l'informatique et du greenbusiness offrent concrètement aux savants des temps modernes la possibilité d'inventer le futur. Il suffit, pour s'en rendre compte, d'observer rétrospectivement l'impact qu'a eu la démocratisation d'internet sur l'activité et l'organisation de nos entreprises, voire même sur la nature des relations humaines et les dynamiques de groupe.
En effectuant un retour arrière d'une vingtaine d'années à peine, on a du mal à imaginer que des objets de consommation courante comme l'Iphone, le Kinect, les oreillettes Bluetooth et les tablettes numériques seraient créées aussi rapidement. Dans les années 1990, Nintendo et Sega rivalisaient sur les consoles portatives Game Boy et Game Gear, devenues de véritables antiquités de collection à l'heure du smartphone qui ne fait pas encore tout, mais cela ne saurait tarder.
Il peut s'avérer parfois difficile de situer le curseur à la bonne distance entre le véritable besoin et l'envie pure, difficile de différencier la nécessité du plaisir. On peut se référer aux rumeurs concernant les prochains smartphones qui annoncent une fonction "carte bancaire " intégrée, ou à la généralisation de la mémoire "cloud" qui dématérialisera complètement la sauvegarde du patrimoine informationnel de l'humanité.
Si ces objets du quotidien revêtent une importance toute relative et sont parfois le fruit de l'imagination d'entrepreneurs malins, qui ont poussé l'anticipation jusqu'à créer des besoins pour mieux y répondre, il existe bien des domaines dans lesquels les avancées technologiques sont synonymes d'enjeux stratégiques majeurs, voire de survie de notre civilisation si l'on en croit certains climato-alarmistes.
Ainsi, les technologies énergétiques se conforment aux exigences actuelles de durabilité... mais aussi de nomadisme! Qui aurait soupçonné, dans les années 1980, qu'un ordinateur pourrait un jour devenir "portable" grâce aux progrès réalisés dans le domaine des batteries rechargeables? Qui aurait osé prétendre, à la même époque, qu'on pourrait décentraliser la production d'énergie ou construire des bâtiments à énergie dite "positive"? Philippe Alleil, CTO chez Forsee Power Solutions une société spécialisée dans les batteries portatives, expliquait que "Depuis le milieu du XIXème siècle, la technologie de l'accumulateur n'a cessé d'évoluer." Pour autant, "Les enjeux liés à l'énergie rechargeable sont tels, qu'on aura toujours besoin d'efforts de R&D pour accompagner la demande croissante d'écologie et de "nomadisme." En effet, l'évolution des technologies énergétiques est intimement liée aux besoins exprimés dans tous les autres secteurs.
Cette corrélation n'est pas sans influence sur le quotidien du "dirtech" de Forsee Power, qui évoque les grandes lignes de son métier: en ces termes: "Le rôle du directeur technique, en dehors de sa responsabilité opérationnelle, est d'être à l'écoute permanente des signaux qui émanent du marché. Il peut s'agir de suivre de près l'évolution des process industriels de fabrication, de s'imprégner en permanence de l'évolution technique et des biens d'équipement, ou d'anticiper les ruptures technologiques par exemple. Surveiller l'apparition de nouveaux usages par le consommateur nous permet également de garder un oeil avisé sur la probable évolution des biens que nous équipons en systèmes de batteries (légèreté ou ergonomie par exemple). "
Une tonalité de discours que n'aurait probablement pas démenti Steve Jobs, devenu légende vivante et surtout gourou de l'anticipation, comme le suggère la vidéo "Apple: 30 ans d'évolutions technologiques en trente secondes"... Mais prédire les ruptures, voire ne serait-ce que les évolutions technologiques, est-ce vraiment possible? Einstein, en tout cas, prônait un double recul philosophique et historique pour comprendre les trajectoires de l'innovation. Ou finalement, l'innovation est-elle autant une question d'intuition, de sensibilité au changement, qu'une question de sciences et de techniques?
Tout semble l'indiquer en tout cas. C'est ce qu'illustre avec beaucoup d'humour et de bon sens le blog "Déselection naturelle": "Et même des experts se fourvoient. Je prendrais pour exemple l’éminent scientifique Lord Kelvin qui a affirmé “une machine volante plus lourde que l’air est impossible.” Ou Thomas Watson Jr, PDG d’IBM qui en 1943 voyait “un marché mondial de 5 ordinateurs.”
Inversement, que seraient les plus brillantes inventions sans la prise en compte des usages? Le philosophe Bernard Stiegler, pour sa part, pense qu'il n'y a "pas d'innovation sans invention, mais il existe beaucoup d'inventions qui ne produisent aucune innovation. L'innovation consiste à socialiser des inventions technologiques." En effet, l'innovation serait le versant opérationnel de l'invention: est utile, ce qui est utilisable! C'est une question de bon sens.
"L'innovation, poursuit Stiegler, consiste à socialiser des inventions technologiques, elles-mêmes issues de découvertes scientifiques. Innover, c'est produire du nouveau (méthodes, objets, services) pour l'installer sur un marché." Ainsi, la capacité à diffuser la technologie serait aussi important que l'idée de départ afin. Par exemple, Sony aurait fabriqué - selon le célèbre prospectiviste Jeremy Rifkin - près de 5000 produits nouveaux. Mais la plupart ont sitôt disparu choix stratégique et budgétaires obligent! France Télécom a largement contribué à établir la norme GSM, mais c'est Nokia qui en socialisant cette norme a su largement en tirer les marrons du feu.
Dès lors, l'injonction anglo-saxonne bien connue "Out of the Box", enjoignant les créatifs de "sortir de leur boîte", initie la dynamique d'invention mais ne suffit pas à la valoriser. En France par exemple, explique Stiegler, "où il y a d'excellents chercheurs, le management ne sait pas valoriser la recherche - le nez collé sur le court terme, il accuse d'autant plus les chercheurs de conservatisme qu'il manque de vision de l'avenir et refuse de prendre des risques." En d'autres termes, la créativité et le savoir-faire technologique n'ont d'issue que si la société se les approprie. C'est ce qui explique probablement que, selon certaines études, 60% des produits lancés ne trouvent pas leur public.
Ne peut alors être considérée comme une innovation que l'invention qui apporte une réelle valeur ajoutée à l'utilisateur. C'est pour cette raison que les concepts d'innovation participative, de co-innovation avec les clients et les fournisseurs, ou plus encore celui d'innovation ascendante. Pour définir ce concept simplement, disons qu'il s'agit d'une dynamique d'innovation qui prend son essor dans l'exploration des usages. Dominique Cardon, responsable du Pôle usage au Laboratoire de sociologie des usages de France Télécom R&D, l'explique ainsi: "La notion d’usage est née de la volonté de sortir de la focalisation sur l’utilisation (on parle également d’utilisabilité) qui avait souvent cours dans la façon d’intégrer l’utilisateur final dans le travail de conception." Pour le dirtech de Forsee Power, Philippe Alleil, interrogé sur la course à l'innovation dans le domaine des batteries de nouvelle génération, "La course à la sophistication n'est pas forcément un vecteur d'efficacité dans le monde de l'énergie embarquée. On attend d'abord d'un système de batteries qu'il soit adapté aux usages, ergonomique et optimisé." Dominique Cardon estime enfin que cette philosophie ouverte de R&D "permet d’observer les besoins non perçus qui entraînent des détournements de fonctionnalités, les évolutions que les usagers apportent aux outils, services et techniques proposés".
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Une chose est sûre: de la prédiction des usages, découle l'anticipation des évolutions technologiques. Car tant que l'homme aura des besoins, il y aura des entreprises pour chercher à les combler. Et ce que client veut...
En effectuant un retour arrière d'une vingtaine d'années à peine, on a du mal à imaginer que des objets de consommation courante comme l'Iphone, le Kinect, les oreillettes Bluetooth et les tablettes numériques seraient créées aussi rapidement. Dans les années 1990, Nintendo et Sega rivalisaient sur les consoles portatives Game Boy et Game Gear, devenues de véritables antiquités de collection à l'heure du smartphone qui ne fait pas encore tout, mais cela ne saurait tarder.
Il peut s'avérer parfois difficile de situer le curseur à la bonne distance entre le véritable besoin et l'envie pure, difficile de différencier la nécessité du plaisir. On peut se référer aux rumeurs concernant les prochains smartphones qui annoncent une fonction "carte bancaire " intégrée, ou à la généralisation de la mémoire "cloud" qui dématérialisera complètement la sauvegarde du patrimoine informationnel de l'humanité.
Si ces objets du quotidien revêtent une importance toute relative et sont parfois le fruit de l'imagination d'entrepreneurs malins, qui ont poussé l'anticipation jusqu'à créer des besoins pour mieux y répondre, il existe bien des domaines dans lesquels les avancées technologiques sont synonymes d'enjeux stratégiques majeurs, voire de survie de notre civilisation si l'on en croit certains climato-alarmistes.
Ainsi, les technologies énergétiques se conforment aux exigences actuelles de durabilité... mais aussi de nomadisme! Qui aurait soupçonné, dans les années 1980, qu'un ordinateur pourrait un jour devenir "portable" grâce aux progrès réalisés dans le domaine des batteries rechargeables? Qui aurait osé prétendre, à la même époque, qu'on pourrait décentraliser la production d'énergie ou construire des bâtiments à énergie dite "positive"? Philippe Alleil, CTO chez Forsee Power Solutions une société spécialisée dans les batteries portatives, expliquait que "Depuis le milieu du XIXème siècle, la technologie de l'accumulateur n'a cessé d'évoluer." Pour autant, "Les enjeux liés à l'énergie rechargeable sont tels, qu'on aura toujours besoin d'efforts de R&D pour accompagner la demande croissante d'écologie et de "nomadisme." En effet, l'évolution des technologies énergétiques est intimement liée aux besoins exprimés dans tous les autres secteurs.
Cette corrélation n'est pas sans influence sur le quotidien du "dirtech" de Forsee Power, qui évoque les grandes lignes de son métier: en ces termes: "Le rôle du directeur technique, en dehors de sa responsabilité opérationnelle, est d'être à l'écoute permanente des signaux qui émanent du marché. Il peut s'agir de suivre de près l'évolution des process industriels de fabrication, de s'imprégner en permanence de l'évolution technique et des biens d'équipement, ou d'anticiper les ruptures technologiques par exemple. Surveiller l'apparition de nouveaux usages par le consommateur nous permet également de garder un oeil avisé sur la probable évolution des biens que nous équipons en systèmes de batteries (légèreté ou ergonomie par exemple). "
Une tonalité de discours que n'aurait probablement pas démenti Steve Jobs, devenu légende vivante et surtout gourou de l'anticipation, comme le suggère la vidéo "Apple: 30 ans d'évolutions technologiques en trente secondes"... Mais prédire les ruptures, voire ne serait-ce que les évolutions technologiques, est-ce vraiment possible? Einstein, en tout cas, prônait un double recul philosophique et historique pour comprendre les trajectoires de l'innovation. Ou finalement, l'innovation est-elle autant une question d'intuition, de sensibilité au changement, qu'une question de sciences et de techniques?
Tout semble l'indiquer en tout cas. C'est ce qu'illustre avec beaucoup d'humour et de bon sens le blog "Déselection naturelle": "Et même des experts se fourvoient. Je prendrais pour exemple l’éminent scientifique Lord Kelvin qui a affirmé “une machine volante plus lourde que l’air est impossible.” Ou Thomas Watson Jr, PDG d’IBM qui en 1943 voyait “un marché mondial de 5 ordinateurs.”
Inversement, que seraient les plus brillantes inventions sans la prise en compte des usages? Le philosophe Bernard Stiegler, pour sa part, pense qu'il n'y a "pas d'innovation sans invention, mais il existe beaucoup d'inventions qui ne produisent aucune innovation. L'innovation consiste à socialiser des inventions technologiques." En effet, l'innovation serait le versant opérationnel de l'invention: est utile, ce qui est utilisable! C'est une question de bon sens.
"L'innovation, poursuit Stiegler, consiste à socialiser des inventions technologiques, elles-mêmes issues de découvertes scientifiques. Innover, c'est produire du nouveau (méthodes, objets, services) pour l'installer sur un marché." Ainsi, la capacité à diffuser la technologie serait aussi important que l'idée de départ afin. Par exemple, Sony aurait fabriqué - selon le célèbre prospectiviste Jeremy Rifkin - près de 5000 produits nouveaux. Mais la plupart ont sitôt disparu choix stratégique et budgétaires obligent! France Télécom a largement contribué à établir la norme GSM, mais c'est Nokia qui en socialisant cette norme a su largement en tirer les marrons du feu.
Dès lors, l'injonction anglo-saxonne bien connue "Out of the Box", enjoignant les créatifs de "sortir de leur boîte", initie la dynamique d'invention mais ne suffit pas à la valoriser. En France par exemple, explique Stiegler, "où il y a d'excellents chercheurs, le management ne sait pas valoriser la recherche - le nez collé sur le court terme, il accuse d'autant plus les chercheurs de conservatisme qu'il manque de vision de l'avenir et refuse de prendre des risques." En d'autres termes, la créativité et le savoir-faire technologique n'ont d'issue que si la société se les approprie. C'est ce qui explique probablement que, selon certaines études, 60% des produits lancés ne trouvent pas leur public.
Ne peut alors être considérée comme une innovation que l'invention qui apporte une réelle valeur ajoutée à l'utilisateur. C'est pour cette raison que les concepts d'innovation participative, de co-innovation avec les clients et les fournisseurs, ou plus encore celui d'innovation ascendante. Pour définir ce concept simplement, disons qu'il s'agit d'une dynamique d'innovation qui prend son essor dans l'exploration des usages. Dominique Cardon, responsable du Pôle usage au Laboratoire de sociologie des usages de France Télécom R&D, l'explique ainsi: "La notion d’usage est née de la volonté de sortir de la focalisation sur l’utilisation (on parle également d’utilisabilité) qui avait souvent cours dans la façon d’intégrer l’utilisateur final dans le travail de conception." Pour le dirtech de Forsee Power, Philippe Alleil, interrogé sur la course à l'innovation dans le domaine des batteries de nouvelle génération, "La course à la sophistication n'est pas forcément un vecteur d'efficacité dans le monde de l'énergie embarquée. On attend d'abord d'un système de batteries qu'il soit adapté aux usages, ergonomique et optimisé." Dominique Cardon estime enfin que cette philosophie ouverte de R&D "permet d’observer les besoins non perçus qui entraînent des détournements de fonctionnalités, les évolutions que les usagers apportent aux outils, services et techniques proposés".
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Une chose est sûre: de la prédiction des usages, découle l'anticipation des évolutions technologiques. Car tant que l'homme aura des besoins, il y aura des entreprises pour chercher à les combler. Et ce que client veut...