La résilience des Japonais face aux catastrophes naturelles ou industrielles a toujours forcé l’admiration du monde entier. De tsunamis en tremblements de terre en passant par les typhons et autre catastrophes nucléaires, les Japonais ont toujours affronté les éléments naturels et les défaillances technologiques avec la même détermination à passer outre la fatalité. Mais le stoïcisme propre à la culture nippone n’est pas à confondre avec de la résignation. Et lorsque le pire est évitable ou aurait pu être évité, c’est tout un pays qui monte au créneau. Le Japon est aussi un pays de tradition guerrière en dépit d’une Constitution résolument pacifiste depuis 1945.
Or, dans le cas de catastrophes récentes, certaines responsabilités humaines, coupables de négligences multiples, sont clairement montrées du doigt : la désinvolture de la filière bois, responsable de l’exploitation des massifs forestiers et des process de traitement du bois local aurait ainsi aggravé les conséquences des pluies torrentielles qui ont frappé l’archipel en juillet 2017. C’est en tout cas ce qui ressort des différentes enquêtes pour comprendre comment un bilan de 30 morts a pu être atteint dans un pays où ce genre d’événements climatiques est pourtant habituel. Face aux inondations, le Japon dispose d’infrastructures, de moyens de secours et de compétences qui le placent parmi les pays les plus armés pour faire face. Un tel bilan est d’autant plus intolérable pour les Japonais.
Au moment du drame, ce qui a interpellé les victimes, c’est le nombre très élève de troncs d’arbres et autres reliquats d’une exploitation forestière à l’abandon ou presque. Entre l’érosion des sols provoqué par l’exploitation des forêts et l’amoncellement de troncs en attente d’être emportés, toutes les conditions étaient en effet réunies pour provoquer éboulements, glissements de terrain et coulées de boues dévastatrices : dans la région d’Asakura, dans le département de Fukuoka, 200 000 tonnes de troncs abattus se sont jointes aux flots pour dévaster les routes, les ponts et les habitations, amplifiant de façon catastrophique l’impact des inondations. Cela a également eu pour effet de compliquer sérieusement la tâche des secours, bloqués par des amoncellements sans précédent (à part le tsunami de 2011) de débris et troncs enchevêtrés.
La colère des habitants de cette région montagneuse s’est donc tournée vers l’industrie forestière, qui, à la peine, a laissé sur place les troncs abattus en attendant de pouvoir les exploiter. Il est vrai que le secteur du bois japonais traverse depuis des décennies des difficultés quasi insurmontables. La Constitution n’est en effet pas le seul aspect de la vie des Japonais qui a changé après 1945. Traumatisés par les grands incendies consécutifs aux bombardements incendiaires américains (sans même parler des deux bombes atomiques), le Japon a progressivement délaissé les constructions traditionnelles en bois, jusque-là très largement majoritaires. Mais les reliquats du passé sont encore très présents et provoquent parfois des catastrophes, comme en décembre 2016 à Itoigawa, lors d’un incendie qui a partiellement ou totalement détruit 140 maisons. Modernisme et normes antisismiques aidant, les constructions en bois deviennent désormais de plus en plus rares au fur et à mesure des démolitions et des reconstructions. A ce délaissement progressif du bois en construction, s’est ajouté la concurrence des bois d’importations, bien moins chers que les cèdres et cyprès du Japon jusque-là privilégiés en bois d’œuvre.
Les deux phénomènes conjugués, baisse de la demande locale et hausse des importations (le Japon est aujourd’hui le premier importateur de bois avec près de 25% des importations mondiales) sont sur le point d’achever la filière bois japonaise, qui laisse aujourd’hui péricliter une large partie des espaces forestiers exploités. Ajoutons à cela une surabondance de conifères, appauvrissant la biodiversité et affaiblissant la résistance des sols à l’érosion, et tout est en place pour de futures catastrophes du même ordre. Ce n’est pourtant pas un caprice de la nature qui sera encore en cause, mais la négligence d’une filière bois qui, non seulement, n’a pas su s’adapter aux évolutions de la société japonaise, mais en plus n’assume plus aucune de ses responsabilités en matière de gestion du patrimoine forestier. L’ensemble se paie aujourd’hui en dizaines de morts qui pourraient être évitées.
Au regard de l’expérience des Japonais, le citoyen français serait aussi en droit de s’interroger sur certains choix et certaines décisions prises en France concernant le recours aux constructions en bois : si le Japon, pays coutumier des constructions en bois depuis des millénaires, s’en détourne aujourd’hui, pourquoi la France s’entiche-t-elle à ce point de ce mode de construction, compte tenu des risques (d’incendies notamment) que cela représente ? C’est peut-être précisément parce que nous n’avons pas cette expérience des Japonais que nous envisageons aujourd’hui des projets extrêmement problématiques, comme des immeubles de grande hauteur (IGH) à structure bois. Malheureusement, il faudra certainement attendre une probable catastrophe pour que les pouvoirs publics prennent enfin la mesure des risques que le bois représente en construction. Une fois encore, nous serions bien inspirés de tirer les leçons de ce qui se passe à l’étranger, avant de nous lancer, trop sûrs de nous, dans des projets aussi risqués.
Or, dans le cas de catastrophes récentes, certaines responsabilités humaines, coupables de négligences multiples, sont clairement montrées du doigt : la désinvolture de la filière bois, responsable de l’exploitation des massifs forestiers et des process de traitement du bois local aurait ainsi aggravé les conséquences des pluies torrentielles qui ont frappé l’archipel en juillet 2017. C’est en tout cas ce qui ressort des différentes enquêtes pour comprendre comment un bilan de 30 morts a pu être atteint dans un pays où ce genre d’événements climatiques est pourtant habituel. Face aux inondations, le Japon dispose d’infrastructures, de moyens de secours et de compétences qui le placent parmi les pays les plus armés pour faire face. Un tel bilan est d’autant plus intolérable pour les Japonais.
Au moment du drame, ce qui a interpellé les victimes, c’est le nombre très élève de troncs d’arbres et autres reliquats d’une exploitation forestière à l’abandon ou presque. Entre l’érosion des sols provoqué par l’exploitation des forêts et l’amoncellement de troncs en attente d’être emportés, toutes les conditions étaient en effet réunies pour provoquer éboulements, glissements de terrain et coulées de boues dévastatrices : dans la région d’Asakura, dans le département de Fukuoka, 200 000 tonnes de troncs abattus se sont jointes aux flots pour dévaster les routes, les ponts et les habitations, amplifiant de façon catastrophique l’impact des inondations. Cela a également eu pour effet de compliquer sérieusement la tâche des secours, bloqués par des amoncellements sans précédent (à part le tsunami de 2011) de débris et troncs enchevêtrés.
La colère des habitants de cette région montagneuse s’est donc tournée vers l’industrie forestière, qui, à la peine, a laissé sur place les troncs abattus en attendant de pouvoir les exploiter. Il est vrai que le secteur du bois japonais traverse depuis des décennies des difficultés quasi insurmontables. La Constitution n’est en effet pas le seul aspect de la vie des Japonais qui a changé après 1945. Traumatisés par les grands incendies consécutifs aux bombardements incendiaires américains (sans même parler des deux bombes atomiques), le Japon a progressivement délaissé les constructions traditionnelles en bois, jusque-là très largement majoritaires. Mais les reliquats du passé sont encore très présents et provoquent parfois des catastrophes, comme en décembre 2016 à Itoigawa, lors d’un incendie qui a partiellement ou totalement détruit 140 maisons. Modernisme et normes antisismiques aidant, les constructions en bois deviennent désormais de plus en plus rares au fur et à mesure des démolitions et des reconstructions. A ce délaissement progressif du bois en construction, s’est ajouté la concurrence des bois d’importations, bien moins chers que les cèdres et cyprès du Japon jusque-là privilégiés en bois d’œuvre.
Les deux phénomènes conjugués, baisse de la demande locale et hausse des importations (le Japon est aujourd’hui le premier importateur de bois avec près de 25% des importations mondiales) sont sur le point d’achever la filière bois japonaise, qui laisse aujourd’hui péricliter une large partie des espaces forestiers exploités. Ajoutons à cela une surabondance de conifères, appauvrissant la biodiversité et affaiblissant la résistance des sols à l’érosion, et tout est en place pour de futures catastrophes du même ordre. Ce n’est pourtant pas un caprice de la nature qui sera encore en cause, mais la négligence d’une filière bois qui, non seulement, n’a pas su s’adapter aux évolutions de la société japonaise, mais en plus n’assume plus aucune de ses responsabilités en matière de gestion du patrimoine forestier. L’ensemble se paie aujourd’hui en dizaines de morts qui pourraient être évitées.
Au regard de l’expérience des Japonais, le citoyen français serait aussi en droit de s’interroger sur certains choix et certaines décisions prises en France concernant le recours aux constructions en bois : si le Japon, pays coutumier des constructions en bois depuis des millénaires, s’en détourne aujourd’hui, pourquoi la France s’entiche-t-elle à ce point de ce mode de construction, compte tenu des risques (d’incendies notamment) que cela représente ? C’est peut-être précisément parce que nous n’avons pas cette expérience des Japonais que nous envisageons aujourd’hui des projets extrêmement problématiques, comme des immeubles de grande hauteur (IGH) à structure bois. Malheureusement, il faudra certainement attendre une probable catastrophe pour que les pouvoirs publics prennent enfin la mesure des risques que le bois représente en construction. Une fois encore, nous serions bien inspirés de tirer les leçons de ce qui se passe à l’étranger, avant de nous lancer, trop sûrs de nous, dans des projets aussi risqués.